Depuis 2008, les contribuables assujettis à L’IR et à l’ISF peuvent défiscaliser une partie des montants dus à l’Etat (respectivement 18% dans la limite de 50Keuros pour une personne seule et 50% dans la limite de 90Keuros pour un foyer fiscal) en investissant au capital des PME françaises.
La loi de finance rectificative pour 2015 emporte des changements regrettables sur les effets des dispositifs IR-PME et ISF-PME, alors que le Rapport de la Cour des comptes du 15 février pointe du doigt l’essoufflement du dispositif en raison de l’instabilité législative ; et voit à tort son salut dans l’harmonisation en cour avec le droit européen.
Les changements intervenus dans la loi de finance rectificative pour 2015 applicable au 1er janvier 2016 sabordent un peu plus un dispositif participant pourtant du renforcement des fonds propres de nos petites et moyennes entreprises hexagonales. En effet, désormais :
- Les souscriptions en numéraire réalisées dans le cadre d’une augmentation de capital ne sont plus éligibles à ces dispositifs lorsque le redevable est associé ou actionnaire de la société bénéficiaire. Un dirigeant associé ou actionnaire, ne peut donc plus investir dans sa propre société tout en réduisant une partie de son impôt.
- Les dispositifs sont recentrés sur les PME de moins de 7 ans (à compter de la première vente commerciale), ou bien dans des PME de plus de 7 ans si l’investissement est destiné à financer le développement de nouveaux produits ou de marchés géographiques. Mais alors, l’investissement doit être supérieur à 50% du CA annuel moyen de la société des 5 années précédentes. Une usine à gaz qui va pénaliser les milliers de PME ayant bénéficiant jusque-là de nouveaux moyens capitalistiques au service de leur pérennité.
Contrairement à ce que certaines analyses laissent entendre, la Cour des comptes ne dresse pas une analyse si mitigée de l’impact de ces deux dispositifs. En revanche, elle critique profondément la forme et le cadre d’application de ces incitations fiscales devenues plus restrictives et plus complexes au fil des changements législatifs depuis 2008. Le dernier en date entérine les caprices de la Commission Européenne qui voyait dans ces outils une « aide d’état » aux entreprises.
N’oublions pas que la dépense Fiscale ISF-PME, si elle était de 800 millions d’euros en 2010 (18% du montant de l’ISF collecté) est à nouveau en nette hausse en 2015 (559 millions d’euros, 11% du montant de 5,59 milliards) par rapport aux 528 millions de 2014. Ce sont donc près de 5 milliards d’euros injectés en 8 ans au bénéfice des TPE et PME françaises, par des contribuables français qui ont choisi d’investir des sommes importantes, défiscalisées seulement en parties et sans garantie de retour sur investissement.
Dans l’attente de la suppression de l’ISF, cet impôt désuet que la France est le dernier état démocratique au monde à conserver, c’est au contraire une défiscalisation toujours partielle mais accrue en pourcentage comme en montant qu’il faut consentir à ceux qui injectent de l’argent dans l’économie réelle.
La liberté d’entreprendre de nos capitaines d’industries et de services, tout comme le droit d’investir dans les entreprises françaises au moyen des outils mis en place par le Gouvernement, ne doivent pas subir les pressions des instances européennes. Bruxelles n’a pas à décider de la nature et du sort d’un dispositif fiscal qui s’applique en partie à un impôt qui n’est en vigueur dans aucun autre pays de l’Union. Et si d’aventure nous devions justifier notre indépendance, inspirons nous de l’Enterprise Investment Scheme (EIS) mis en place par nos voisins d’outre-Manche et qui permet de bénéficier d’une réduction d’IR de 30% dans le cadre d’un investissement pouvant atteindre 1 millions de livres sterling.
Pierre Grandjean
membre du Collectif Audace
Entrepreneur